KÂÂ
Et puis les chiens parlaient...JJJJ
Fleuve Noir, coll. "SF Mystère"
190 pages, 35 francs
Et une brise vivifiante souffla sur le fantastique français, elle
se prénomait Kââ... Avec Et puis les chiens parlaient....,
cet auteur, qui se veut par jeu mystérieux, fait une entrée
fracassante dans le monde du fantastique. Son roman est une petite merveille
notamment grâce à un style très particulier à
la fois percutant et empreint d'une rage et d'un cynisme délicieux.
Le héros (qui est aussi le narrateur) est un étudiant qui prépare sans réelle volonté une thèse de doctorat en biologie tout en étant persuadé de la noirceur de son avenir. Il traîne ainsi désoeuvré, entre Paris et le Nord, entre une chambre d'étudiant infâme et une tante trop envahissante. Il pense que cette dernière est sa seule famille jusqu'au jour où il apprend qu'il hérite d'un oncle dont on lui a caché l'existence. L'héritage se compose de 600 000 $ et... d'une île en plein milieu du Pacifique ! Pour notre héros, c'est l'occasion ou jamais de quitter sa vie fade et morne pour la promesse d'une existence meilleure dans un atoll paradisiaque. Mais il déchante vite car les événements bizarres et inquiétants se précipitent. Il y a d'abord ce millionnaire japonais aux accents de démence qui lui propose 1 000 000 $ pour abandonner son héritage. Puis il y a la maison de son oncle sur cette île qui semble avoir été préparée spécialement pour lui. Quant aux indigènes, ils ont été exterminés au gaz sarin. Pourtant, notre héros n'est pas au bout de ses surprises et son voyage vers l'horreur ne fait que débuter.
Kââ est connu pour ses
romans policiers aux personnages décalés et la quatrième
de couverture nous le présente comme un amateur d'armes à
feu, de gastronomie et de doctrines stratégiques. En passant dans
le domaine du fantastique, cet auteur atypique a emmené avec lui
son univers déjanté. Il met en scène une galerie de
portraits loufoques à commencer par le héros, looser cynique
qui marche sans cesse sur le fil de la folie. Il y a le richissime Nataguma
dont la démence en fait une sorte de démon. Mais la réussite
est sans nul doute le colonel Atojo mais là je vous le laisse découvrir
par vous-même. La gastronomie, quant à elle, sert de point
de repère dans ce monde irréel, de point d'attache à
la réalité. Lorsque le climat de l'île se fait par
trop fantasmagorique, le héros se prépare un festin gargentuesque
avec des mets de France, festin qui représente une sorte de bouée
de sauvetage l'empêchant de sombrer dans la folie.
Le scénario est foisonnant,
touffu mélangeant allègrement Seconde Guerre Mondiale, expérimentation
animale, secte millénariste. Il en résulte une ambiance oppressante
qui devient parfois horrifique. Le rythme est mené tambour battant
sans relâchement pour exploser en un final de fureur et de sang.
Pour les amateurs de fantastique, Et
puis les chiens parlaient... doit figurer dans toute bonne bibliothèque.
Et espérons que Kââ continuera son parcours dans le
fantastique.